Nécessité de se connaître.

mercredi 27 septembre 2006.

Nécessité de se connaître. Homélies sur le Cantique des Cantiques - L. 2, v. 8.

Comment l’âme se connaît elle-même, c’est, je pense, ce qu’il n’est pas facile d’expliquer brièvement. J’essaierai pourtant d’en dire quelque chose selon mes forces. Il me semble donc que l’âme doit se connaître elle-même de deux manières : ce qu’elle est et comment elle se meut, c’est-à-dire ce qu’elle a dans sa substance et dans ses affections. Qu’elle comprenne par exemple si son amour est l’amour du bien ou de ce qui n’est pas bien, si ses résolutions sont droites ou non ; et dans le cas où elles sont droites, si elle a le même propos à l’égard de toutes les vertus, tant pour en avoir une idée juste que pour les mettre en pratique, ou seulement à l’égard des devoirs nécessaires et faciles. Estelle disposée à progresser, à grandir dans l’intelligence des choses et l’accroissement des vertus, ou bien s’arrête-t-elle et se tient-elle au point où elle a pu parvenir ? Se préoccupe-t-elle seulement de sa propre culture ou cherche-t-elle à servir les autres, à leur être utile par la parole de l’enseignement ou par l’exemple des actions ? Si elle reconnaît elle-même qu’elle n’a pas de bonnes affections et une droite résolution, elle doit se rendre compte si beaucoup de choses lui manquent et si elle est loin de la route des vertus, ou bien si elle est déjà dans le bon chemin et s’efforce d’avancer en désirant acquérir ce qui est en avant et oublier ce qui est en arrière, bien qu’elle ne soit pas encore près du but, ou que, s’en étant rapprochée, elle ne soit pas encore arrivée à la perfection. C’est encore l’œuvre de l ;âme qui se connaît elle-même de voir si le mal qu’elle fait, elle le fait par attachement et avec ardeur ou seulement par fragilité, et, comme dit l’Apôtre, en accomplissant ce qu’elle ne veut pas et en faisant ce qu’elle déteste ; de même elle doit voir si ce qui est bien elle le fait avec des affections et un propos ordonnés. Par exemple, retient-elle sa colère à l’égard de certains et la déchaîne-t-elle contre d’autres, ou bien la retient-elle toujours et ne la déchaîne-t-elle jamais ? De même pour la tristesse : en triomphe-t-elle en certaines affaires et l’accueille-t-elle en d’autres ou bien la repousse-t-elle toujours ? Et encore à l’égard de la crainte et des autres mouvements qui sont opposés aux vertus. C’est aussi le devoir de l’âme qui se connaît de savoir si elle désire avidement la gloire, ou un peu, ou pas du tout : ce que l’on peut conclure de ce qu’elle se plaît beaucoup ou peu ou pas du tout aux louanges, et de ce qu’elle s’attriste beaucoup ou peu ou pas du tout des opprobres. Il y a aussi, en ce qui regarde les dons faits ou reçus, des marques de l’âme qui se connaît elle-même : lorsqu’elle distribue ou donne quelque chose, le fait-elle avec agrément, en paraissant aimer le règne de l’égalité entre les hommes, ou, selon la parole de l’Apôtre, par tristesse ou par nécessité, ou du moins en recherchant la reconnaissance de ceux qui reçoivent ou qui apprennent sa générosité. En recevant, l’âme qui se connaît elle-même remarquera si elle regarde avec indifférence ce qu’elle a reçu, ou si elle s’en réjouit comme d’un bien. Pour ce qui est de l’intelligence, cette âme s’efforcera de connaître si elle se laisse facilement émouvoir en apprenant toutes les nouvelles vraisemblables, et si elle est sensible à l’art, à la douceur, à l’habileté des discours, ou si elle n’est ainsi touchée que rarement ou pas du tout. En voilà assez sur ce genre de connaissance.

Voir en ligne: JesusMarie.


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