Conférences - 8, 12. Si serrée est la multitude des esprits mauvais qui peuplent l’air répandu entre le ciel et la terre et s’y agitent dans une perpétuelle activité, que ce fut à la Providence une heureuse pensée de les soustraire aux regards humains. Leur effroyable concours ou l’horreur des formes qu’ils revêtent tour à tour à leur gré n’eussent pas manqué de consterner les hommes ni de les faire défaillir sous le poids d’une intolérable épouvante : des yeux de chair ne sont pas faits pour de tels spectacles. Ou bien leur continuel exemple, en les provoquant à l’imiter, les eût contaminés et rendus chaque jour plus méchants. De là, entre les hommes et les immondes puissances de l’air, une dangereuse familiarité, un commerce funeste. Certes il se commet bien des crimes honteux parmi les hommes. Du moins le secret des demeures, la distance ou la pudeur les dérobent-ils aux regards. Mais si on les voyait se perpétrer à découvert chez les démons, la folie de mal faire en deviendrait plus furieuse. Car il n’est pas d’instant qu’ils ne se livrent à cette sorte de fautes, n’étant point sujets, comme nous, à l’épuisement de la chair, aux soins que réclame le bien de famille, ni à la sollicitude du pain quotidien, lesquels nous contraignent souvent, malgré nous, de renoncer à nos entreprises.