De l’incompréhensibilité de la nature de Dieu

La charité

dimanche 15 juillet 2007.
 

Je connais sa charité, je sais combien elle est ardente, toute de feu, et irrésistible, je sais combien elle est profondément enracinée dans son âme, combien il est jaloux d’y rester fidèle. Il sait que la charité est la racine, le principe, la source de tous les biens, que sans elle toutes les autres vertus né nous sont d’aucune utilité. C’est la marque distinctive des disciples du Seigneur, le signe caractéristique des serviteurs de Dieu, l’indice auquel on reconnaissait les apôtres. C’est en cela, dit Jésus-Christ, que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples. (Jean. XIII, 35.) Et en quoi le reconnaîtra-t-on ? Sera-ce en les voyant ressusciter les morts, guérir les lépreux, chasser les démons ? Non, sans doute ; mais laissant tous ces privilèges : C’est en cela, dit-il, que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres. Les prodiges sont de purs dons de la grâce d’en-haut, au lieu que la charité est aussi le mérite de la vertu de l’homme ; et ce sont moins les dons d’en-haut qui font connaître une âme généreuse, que les vertus qui sont aussi le fruit de ses propres efforts. Voilà pourquoi Jésus-Christ annonce que l’on reconnaîtra ses disciples à la charité. En effet, aucune partie de la sagesse ne manque à celui qui est doué de la charité, il possède la vertu la plus entière et la plus parfaite. Sans elle l’homme est dépourvu de tous les biens, c’est la raison pour laquelle saint Paul en fait un si magnifique éloge ; ou plutôt tout ce qu’il peut en dire ne saurait atteindre à son excellence. De l’incompréhensibilité de la nature de Dieu : Première Homélie. 1.

Eh ! qui pourrait assez louer une vertu qui renferme toute la loi et les prophètes ; une vertu sans laquelle la foi, la science, la connaissance des mystères, le martyre même, rien en un mot ne peut nous sauver ? Quand j’aurais livré mon corps pour être brûlé, dit l’Apôtre, si je n’ai pas la charité, cela ne me sert de rien. ( I Cor. XIII, 3.) Et un peu plus bas, pour montrer qu’elle est la plus excellente de toutes les vertus, qu’elle en est la principale, il ajoute : Les prophéties s’anéantiront, les langues cesseront, la science sera abolie... Or, ces trois vertus, la foi, l’espérance et la charité demeurent, mais la plus excellente des trois est la charité. De l’incompréhensibilité de la nature de Dieu : Première Homélie. 2.

Mais, en parlant de la charité, il se présente à nous une question qui n’est pas peu importante. L’anéantissement des prophéties et la cessation des langues n’ont rien qui m’étonne comme ces dons ne nous sont accordés que pour un temps, après avoir rempli pour nous leur office, ils peuvent cesser sans nous faire aucun tort. C’est ainsi qu’à présent les prophéties et le don des langues n’existent plus sans que l’économie de la piété en souffre. Mais l’abolition de la science, c’est là ce qui m’embarrasse. De l’incompréhensibilité de la nature de Dieu : Première Homélie. 2.

Cette multitude innombrable , maintenant réunie et écoutant avec la plus grande attention, je l’ai souvent cherchée des yeux au moment le plus solennel, et je ne l’ai point rencontrée. J’en gémis profondément. Un homme parle, on se hâte , on accourt, on se presse, et l’on demeure jusqu’à la fin de son discours. Jésus-Christ va paraître dans les saints mystères , l’église est vide et déserte ! Cette conduite est-elle pardonnable ? Vous avez du zèle pour entendre la parole de Dieu, c’est bien, mais la conduite que vous tenez ensuite vous ravit tout le mérite de votre assiduité à la prédication. Qui, en vous voyant perdre sitôt le fruit de nos discours, ne nous condamnera nous-même ? Si vous écoutez la parole divine avec un zèle sincère, montrez-le parles oeuvres. Se retirer tout après l’homélie, c’est une preuve que l’on n’a pas été véritablement touché. Si votre âme conservait les enseignements de la chaire, vous resteriez pour assister pieusement à nos redoutables mystères. Mais vous m’écoutez comme un joueur de cithare ; le discours fini, vous vous retirez sans aucun fruit. Quelle excuse banale apportez-vous ? - Je peux prier à la maison ; je ne puis y entendre prêcher ni enseigner. - Vous vous trompez, chrétien ! On peut, il est vrai, prier à la maison, mais on ne peut y prier aussi efficacement qu’à l’église, où la multitude des Pères spirituels est si nombreuse ; où de tous les coeurs montent vers Dieu les supplications. Vous ne serez pas exaucé, en priant seul le souverain Seigneur, comme si vous le faisiez avec vos frères. Vous trouverez ici ce que vous ne trouvez pas dans vos maisons : l’union des coeurs et des voix, le lien de la charité, la prière des prêtres. Les prêtres président, afin que les prières plus faibles du peuple, unies à leurs supplications plus ferventes, montent ensemble vers le ciel. D’ailleurs que sert la prédication sans la prière ? La prière d’abord, et la prédication ensuite. De l’incompréhensibilité de la nature de Dieu : Troisième Homélie. 6.

Pénétrés de ces pensées, accourons tous à ce moment précieux, pour attirer la miséricorde, et trouver grâce et protection. Vous approuvez mes paroles ; vous les recevez avec de bruyants applaudissements, mais si vous voulez manifester vos sentiments par vos oeuvres , voici le moment de montrer votre obéissance ; après l’homélie, la prière, voilà l’approbation que je voue demande ; cette approbation qui se manifeste par les actes. Exhortez-vous mutuellement à rester à vos places ; si quelqu’un veut se retirer, empressez-vous de le retenir ; et recevant la double récompense de votre propre zèle et de cette charité fraternelle, vous répandrez vos prières avec plus de confiance ; vous vous rendrez Dieu propice, vous recevrez les biens présents et futurs par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ à qui soient, avec le Père et le Saint-Esprit, la gloire et l’empire dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. De l’incompréhensibilité de la nature de Dieu : Troisième Homélie. 7.

Telle est la vérité, et en reprenant le texte un peu plus haut, volas verrez clairement que ce n’est point une vaine conjecture. Quant aux viandes offertes aux idoles, nous n’ignorons pas que nous avons tous assez de science. La science enfle, la charité édifie. Quant à ce qui est de manger de ces viandes, nous savons que les idoles ne sont rien dans le monde, et qu’il n’y a nul autre Dieu que le seul Dieu. (I Cor. VIII, 1 et 4.) Il parle, comme vous le voyez, à ces Grecs qui admettaient la pluralité des dieux. Il continue ainsi : Car quoique plusieurs soient appelés dieux, et plusieurs seigneurs au ciel et sur la terre, et qu’il y ait plusieurs dieux et plusieurs seigneurs (c’est-à-dire ainsi appelés), nous n’avons qu’un seul Dieu le Père, d’où tout découle, et qu’un seul Seigneur Jésus-Christ, par qui tout a été fait. (Ibid. 5.) Il se sert du mot seul, pour ne pas leur faire croire qu’il introduisait le polythéisme. Il appelle le Père seul Dieu, sans ôter au Fils la divinité, et le Fils seul Seigneur, sans ravir au Père la domination. Il parle ainsi pour condescendre à leur faiblesse et pour ne pas les scandaliser. C’est pour la même raison que, chez les Juifs, les Prophètes ne parlent pas du Fils de Dieu d’une manière claire et évidente, mais rarement et en termes obscurs. Naguère convertis du polythéisme, s’ils avaient entendu dire : Dieu le Père, Dieu le Fils, ils seraient retombés dans leur premier égarement. Aussi les Prophètes proclament-ils partout et sans cesse, qu’il n’y a qu’un Dieu, qu’il n’y en a pas d’autre que lui. (Deut. IV, 35 ; Is. XLV, 5.) Ils ne nient pas le Fils, non ; mais ils veulent ménager la faiblesse des Juifs, et les détourner de la croyance aux faux dieux. De l’incompréhensibilité de la nature de Dieu : Cinquième Homélie. 3.



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