Corbin (Ibn Arabi:202) – le dhikr
L’enjeu, pour le disciple d’Ibn ’Arabî, est donc grave. Que chacun s’éprouve soi-même et discerne son état spirituel, car ainsi que le déclare un verset qorânique : « L’homme est un témoin qui dépose contre lui-même, quelque excuse qu’il profère (75/14-15). » S’il ne perçoit pas les « répons » divins au cours de l’Oraison, c’est qu’il n’est pas réellement présent avec son Seigneur ; incapable d’entendre et de voir, il n’est pas réellement un mosallî, un orant, ni quelqu’un « qui a un coeur, qui prête l’oreille et est un témoin oculaire » (40/36). Ce que nous avons appelé la « méthode d’oraison » d’Ibn ’Arabî comporte ainsi trois degrés : présence, audition, vision. Quiconque manque l’un de ces trois degrés, reste en dehors de l’Oraison et de ses effets, lesquels sont liés à l’état de fanâ’. Ce mot, nous l’avons vu, ne signifie pas dans la terminologie d’Ibn ’Arabî « l’anéantissement » de la personne, mais son occultation à soi-même, et telle est la condition pour percevoir le dhikr, le répons divin qui est, cette fois, l’action du Seigneur mettant son fidèle au présent de sa propre Présence.
Un même motif fondamental est discernable. L’idée qu’il y ait un répons divin sans lequel l’Oraison ne s’accomplirait pas comme un entretien intime, implique l’idée d’une structure. Cette structure est celle d’un dialogue, et elle pose la question de savoir qui en prend l’initiative, et quel sens il y a à parler d’une initiative. En d’autres termes, qui a le premier rôle et qui a le second? Nous allons voir Ibn ’Arabî appliquer son effort à l’analyse de cette structure, telle que la commande l’intuition la plus profonde et originale de sa théosophie.
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